19/01/2012
Agapé
J’ai quitté mon refuge ce matin. Avant d’en refermer la porte, j’ai erré un moment au milieu de ce qui n’était plus que nostalgie et regrets. Chaque objet me ramène à ce dernier geste, au premier pas d’une nouvelle vie.
J’ai cherché pendant des mois par quel artifice je pourrais me détacher de toi. Comment accepter enfin et convaincre les cieux de m’aider.
J’ai regardé une dernière fois ces murs où des arabesques curieuses dessinent comme des moucharabiehs, mais derrière, personne pour regarder…
Je serais un menteur si je te disais que jamais je ne regarde le jardin dans l’espoir de t’y voir. Je m’assois quelquefois au pied de la statue de Diane, je ferme les yeux et je revois ces journées ensoleillées, où nous avions pour seule idée de festoyer, au milieu des pins, des roses et du carnaval de joie que faisaient nos enfants. Je ne verrais plus cette caravane hétéroclite d’animaux gambader sous les cyprès. Dromadaire, chevrette, paons et pintades dans l’enclos, les enfants construisant des pyramides de pommes et de carottes pour les attirer à eux : c’était la course folle, à qui saurait appâter le premier l’un de ces indifférents, qui ne l’étaient plus tant quand il s’agissait de manger. Ton rire, quand tu voyais la jolie chevrette s’engager dans un rallye pour arriver au tas de pommes avant l’un ou l’autre de ses concurrents… Ce rire me manque. Notre oasis n’est plus, ma vie est redevenue le désert qu’il était avant toi.
Je voyais déjà nos vieilles années se passer ensemble, comme un parfait petit couple chenu et toujours amoureux. Je t’aurais préparé chaque soir ta tisane, un peu de miel pour l’adoucir, écoutant ta voix, le doux bruissement de ton discours et tes charmantes croyances : « n’oublie-pas la propolis, elle te protégera des virus de l’hiver ». J’aurai voulu encore quelques années pour guetter la musique de ton rire, te remercier de ta générosité, toi qui a su m’offrir ton cœur, et prendre le mien, mon cœur fermé de solitaire rustique et dure. Tu reste maitresse du moindre de mes tourments, mais tu n’es plus là pour les apaiser. Peu importe.
J’aurai pu convoquer une pléiade des plus grands poètes, disposer ton corps sur une felouque, telle une divinité, ma divinité, et regarder ton âme s’envoler au milieu du chant des oiseaux : ça n’aurait pas été encore assez pour exprimer mon chagrin. Je me retrouve seul ministre de ton culte, n’arrivant plus à ranimer la ferveur éteinte des jours anciens. Peut-être est-ce le moment ? La fin tant attendue, le jour qui m’allège de ma souffrance sans me libérer de ton souvenir précieux.
C’était comme une découverte, ce matin, au réveil. L’évidence du départ s’était imposée. Enfin.
Ceci est ma participation à l'exercice d' écriture d' Olivia. mots à placer :carnaval – rustique – maîtresse – avant – pyramide – pléiade – nostalgie – dromadaire – pintade – tisane – festoyer – caravane – virus – statue – menteur – désert – propolis – pins – rallye – oasis – felouque – ministre – moucharabieh – divinité – découverte.
23:38 Écrit par Océane | Lien permanent | Commentaires (13) | |
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Commentaires
Écrit par : wens | 20/01/2012
Écrit par : lucie | 20/01/2012
Écrit par : Asphodèle | 20/01/2012
Encore un texte doux-amer...
Écrit par : Olivia | 20/01/2012
Écrit par : marlaguette | 20/01/2012
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